Les communiqués  
 

 

   

Tribune libre : Pour la burqa, la République doit être ferme sans être sectaire

 

Face au port de voiles intégraux, de niqab ou de burqa sur le territoire de la République française, la position de tout socialiste comme de tout républicain, doit être sans ambiguïté : c’est NON ! Nous combattons et combattrons de toutes nos forces des pratiques extrémistes qui sont une atteinte à tous les principes de la République :
-  Une atteinte à la liberté et, en particulier, à la liberté de millions de femmes qui en France comme dans le monde attendent qu’on protège leur liberté de ne pas porter ces voiles intégraux et qui refusent la contrainte que leurs maris, leurs pères, leurs frères leur impose au nom d’idéologies à bien des égards barbares.
-  Une atteinte à l’égalité entre les hommes et les femmes dans la mesure où le port de voiles intégraux est une violence faite aux femmes - et à elles seules ! - en leur imposant de masquer leur identité, leur personnalité.
-  Une atteinte à la fraternité qui suppose que sur l’agora, dans l’espace public l’échange entre les êtres se fasse « à visage découvert » : je te vois, tu peux me voir et nous pouvons, aussi, échanger librement.
-  Une atteinte au principe de laïcité, enfin, qui suppose le « vivre-ensemble » dans la République, avec nos différences, dans le respect de nos différences, sans jamais qu’une de ces différences ne dicte sa loi aux autres. Or, la provocation du port du voile intégral est, clairement une volonté de groupes extrémistes d’imposer leur loi dans l’espace public. Pour toutes ces raisons, nous devons tout faire pour faire régresser ces pratiques minoritaires, les empêcher, voire, si c’est nécessaire, les interdire. Mais nous n’en sommes pas encore là.

Face à ce problème difficile, délicat et, en même temps, limité, le Président de la République, le gouvernement et la majorité UMP portent une responsabilité politique écrasante en organisant le débat de la pire manière qui soit, en tournant le dos au nécessaire consensus républicain, en ouvrant la porte à tous les dérapages les plus honteux, et en prenant le risque de la stigmatisation d’une minorité. Imaginez : un ministre qui ouvre un débat sur l’identité nationale en liant celle-ci à l’immigration, le Président qui, soit disant, recadre le débat par une tribune largement consacrée à la votation des Suisses sur les minarets et, maintenant, un débat sur la burqa ! Immigration / minaret / burqa ... les 3 volets du triptyque sont en place ... Ce pouvoir joue avec le feu d’une manière totalement irresponsable et je soutiens tous ceux qui demandent, une nouvelle fois solennellement, de faire cesser ce débat public honteux. De la même manière, la proposition du Président du Groupe UMP à l’Assemblée Nationale d’une loi simple d’interdiction générale est inacceptable :
-  D’abord, sur la forme, parce que cette proposition est un oukaze qui foule aux pieds les droits du Parlement alors que celui-ci a mis en place une mission d’information à laquelle les députés socialistes ont pris part loyalement. Cet oukaze empêche de fait, tout consensus républicain.
-  Ensuite, sur le fond, parce que cette loi serait une loi de stigmatisation puisqu’elle ne s’adresserait qu’à une catégorie de femmes et à une seule.

Pourquoi ne pas proposer d’abord que tous les moyens du droit actuel soient employés par les pouvoirs publics afin de faire régresser ces pratiques minoritaires ? Le Conseil d’Etat ayant jugé que l’Etat était fondé à refuser la nationalité à une femme portant le voile intégral dans la mesure où celle-ci faisait la preuve de son refus d’intégration, le droit français n’est pas démuni en la matière. Il en va de même dans les services publics dont le principe de neutralité d’une part, et l’exigence d’identification pour quelque formalité que ce soit d’autre part, offrent des possibilités qu’il faut rappeler et faire appliquer.

S’il faut, pour accompagner cette volonté politique, l’éclairer par une résolution du Parlement au titre d’un nouvel article 34 de la Constitution, disposition encore jamais employée, je suis prêt à y participer. Mais la condition que je pose est, bien entendu la fin du débat public sur l’identité nationale : sans ce préalable indispensable, une telle résolution ne serait qu’une contribution - impossible ! - à ce débat.

Si au bout d’une période d’évaluation d’un an ou deux, il était avéré que ces pratiques extrémistes se développaient dans l’espace public, je ne serais pas opposé à une disposition législative d’interdiction. A condition qu’elle soit concrètement applicable et solide juridiquement car rien n’est pire qu’une loi de stigmatisation : de ce point de vue, la proposition de loi de lutte contre les violences faites aux femmes nous paraitrait préférable, de loin, à celle du Président du Groupe UMP.

Enfin, il faut impérativement que la République, à tous ses niveaux, local comme national, développe son dialogue avec les représentants du culte musulman : il faut convaincre ceux-ci qu’ils ne peuvent rester dans une position ambigüe, et à certains égards, contradictoire, qualifiant ces pratiques de « minoritaires » et « n’ayant rien à voir avec le Coran » et, en même temps, nous demandant de ne pas les interdire pour ne pas porter atteinte ... à la liberté religieuse ! Le débat, le dialogue doivent nous permettre de dépasser ces contradictions.

Jean GLAVANY

   
   
         
© 2005 Jean Glavany
Site réalisé avec SPIP